La F.A.P.E.C., Fédération autonome de parents d’élèves engagés et courageux, développe un projet qu’aucune agence de tourisme ne réalisera jamais : nous transporter un siècle en arrière.
Constituée dans le prolongement des journées de retrait des élèves des écoles (JRE), cette fédération entend entrer en résistance et œuvrer pour créer une « alternative à l’Ecole de la République », attendu que celle – ci voudrait « séparer l’enfant de Dieu et de ses parents » !
Le combat qu’elle entend mener actuellement : bannir le livre l’ABCD de l’égalité, interdire la « théorie du genre », même si celle-ci n’existe pas (!),… leurs enfants étant en présence « d’un danger incommensurable », « victimes de sexualisation précoce » …
Les moyens qu’elle envisage : organiser la résistance au sein de l’école, soutenir des alternatives : l’école à domicile, les écoles associatives hors contrat …
Ses voisins : les organisateurs de La Manif pour Tous, le Printemps français…
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Ne nous privons pas de ce saut dans le temps...
Voyage au début du 20ème siècle.
La lèpre de la laïcité cliquer sur l’image pour l’agrandir
Source : Article repris dans « Les Hommes du Jour » d’avril 1935
Décryptage :
Union des associations catholiques de chefs de famille
14 bis rue d’Assas (Paris)
La coéducation des sexes et la gémination des écoles
La coéducation des sexes par la gémination des écoles a fait, depuis la guerre, des progrès effrayants. C’est la « LEPRE DE LA LAICITE ».
Par milliers se comptent les écoles géminées, c’est-à-dire les couples d’écoles dont l’une réunit grands garçons et grandes filles sous la direction de l’instituteur, l’autre, petits garçons et petites filles sous la direction de l’institutrice …
La coéducation et la gémination sont en effet immorales. Par la promiscuité des filles et des garçons, elle excite leurs sens plus tôt qu’on ne le pense, elle enlève aux jeunes filles la réserve et la pudeur et en fait des GARCONNES dès l’âge de treize ans.
Mais n’oublions pas que l’âge de la scolarité va être prolongé jusqu’à quatorze ans, et avec lui la promiscuité ;
Que les cours complémentaires se poursuivent jusqu’à seize ans, et avec eux la promiscuité ;
Que la coéducation a été établie dans les collèges et les lycées dans les classes supérieures, et avec elle la promiscuité jusqu’à l’âge de dix-sept et dix-huit ans.
La promiscuité se pratique en classe et en récréation, et cela suffit pour que plus d’une élève soit déjà allée se faire soigner aux Maternités.
Que sera-ce lorsque, à l’exemple des soviets, abominables apôtres de la coéducation, la promiscuité des sexes se pratiquera dans l’internat et dans la serre surchauffée des dortoirs, après que dans la journée on aura donné (à) filles et garçons réunis l’enseignement sexuel avec exercices pratiques de pièces anatomiques articulées ?
N’y a-t-il pas là un plan abominable de déchristianisation par la corruption de l’âme et du corps de la jeunesse ?
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Qui sont donc ces « Chefs de Famille » qui s’associent ?
L’évêque de Quimper le développe avec précision dans sa lettre au clergé du diocèse (novembre 1909) :
Les questions scolaires ne sont pas conformes à notre dogme ?
Pères de famille** : au combat ! « C’est une question de vie ou de mort. »
Il développe la marche à suivre :
Se regrouper, constituer une association de Pères de Famille par canton
Exercer une vigilance sur l’école, au plus près et dans la durée
Faire la guerre aux mauvais livres et aux mauvaises écoles
Traîner les enseignants fautifs (ou à défaut l’Etat) en justice. Ceux-ci « peuvent avoir en tête des préjugés fâcheux. Ils n’ont plus pour la loi divine et les lois … les idées justes qu’ils devaient à leur catéchisme. »
Ne pas envoyer ses enfants à l’école. Les parents « interdiront à leurs enfants l’usage des manuels condamnés. Ils ne leur permettront même pas de les garder. Ils organiseront enfin, s’il le faut, la grève des écoliers, et, s’ils ne trouvent pas d’école libre où les mettre, ils garderont leurs enfants chez eux aussi longtemps que l’école sera empoisonnée par de mauvais livres. »
« Que les maîtres nous prouvent qu’il n’y a pas de contradiction entre leur livre ou leur parole et l’histoire authentique de l’Eglise, et sa tradition, et ses dogmes ! »
L’intégralité de la lettre de l’évêque
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Les Pères de famille se réunissent
Dimanche 28 avril avait lieu, à Pont Aven, dans la salle du patronage, la 2ème réunion générale des Pères de Famille du canton de Riec.
Une élite de chefs de famille venue des paroisses de Pont Aven, Nizon, Riec, Moëlan et Névez y assistait, sous la présidence de M. Kerébel, curé-doyen de Riec.
On s’était réuni pour entendre réfuter l’Histoire de France de M. Brossolette, cours moyen, en usage dans l’école de garçons à Névez.
M. Pierre Hersart de la Villemarqué, président de l’association cantonale, fit lui-même le procès de ce manuel et releva très soigneusement tout ce qu’il contenait de faux, d’inexact ou de simplement tendancieux sans oublier les omissions voulues. Les auditeurs suivaient sur un tract le résumé de la conférence pendant que l’orateur parlait. Il lui fallut environ une heure et demie pour répondre à la plupart des erreurs du Manuel Brossolette, mais il ne cessa jamais d’être intéressant.
Son succès vient de ce qu’il exposa la vérité historique avec beaucoup de calme, de clarté et de science et qu’il eut l’heureuse idée d’agrémenter son récit de citations de choix et d’anecdotes tirées de l’histoire de Bretagne.
Les assistants sortirent de la réunion convaincus qu’ils devaient surveiller de très près l’enseignement qu’on donne à leurs enfants à l’école laïque et décidés à faire les démarches nécessaires pour faire enlever tous les livres scolaires contraires à leur foi.
Source : Courrier du Finistère 4 mai 1912
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Les écoles mixtes sont combattues
Au Perguet, près de Benodet
Novembre 1923
Protestations des Pères et Mères de Famille de Benodet contre la situation faite à leurs enfants par l’instituteur de Perguet (lettre à l’inspecteur Source : AD 29)
Au hameau de Perguet, en Bénodet, il est une école mixte en laquelle tous les élèves garçons et filles sont contraints par leur instituteur à prendre leur récréation ensemble et en même temps dans une seule et même cour, et cela par la défense faite par lui aux filles d’accéder pour leurs jeux à la cour qui dans l’esprit de tous et jusqu’à présent leur a toujours été destinée à cette fin.
Cette école étant dotée de deux cours parfaitement séparées dont l’une était jusqu’à l’arrivée de l’instituteur actuel exclusivement réservée aux garçons et l’autre aux filles, nous soussignés Pères et Mères des élèves qui fréquentent cette école, justement alarmés des dangers auxquels se trouvent exposées la santé morale et la bonne éducation de nos enfants par le fait pour eux d’être ainsi mêlés pour leurs jeux dans une seule et même cour, et en cas de mauvais temps dans un seul et même préau, protestons énergiquement contre cette situation anormale et illégale faite à nos enfants par leur instituteur et demandons instamment le retour à l’ancien état des choses, les garçons exclusivement dans l’une des cours, les filles exclusivement dans l’autre.
Suivent les signatures
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1909-Certains livres sont bannis par Rome.
Malgré l’attention particulière du Ministère de l’Instruction publique - bien compréhensible dans le moment - … certains livres sont interdits par Rome.
… et l’évêque en rajoute un !
Source : Ouest Eclair sept 1909
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Suivant les directives de son évêque, l’abbé Piriou rédige un tract où il désigne les coupables ….
L’affaire montera jusqu’à M. Doumergue, Ministre de l’Instruction publique.
Source : AD 29
Les suites (avec le tract entièrement décrypté) :
http://laicite-aujourdhui.fr/spip.php?article138
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L’inspection générale de l’éducation nationale s’est exprimée sur le sujet :
« … Ces polémiques convainquent qu’il ne faut pas abandonner le projet de promouvoir les valeurs humanistes de respect, de tolérance et d’égalité en installant une culture de l’égalité des droits entre les filles et les garçons, par l’école et dans l’école. Ce projet s’inscrit dans la politique de lutte contre toutes les formes de discrimination et participe d’une éducation à l’altérité, donc à l’acceptation des singularités et plus largement au bien vivre ensemble… »
Extrait du rapport n° 2014-047 Juin 2014
« …Promouvoir et mettre en œuvre une égalité réelle, ce n’est pas engager pour l’école une priorité de plus, c’est mieux répondre à ses missions fondamentales ; c’est apprendre à faire un usage critique de la pensée contre les fausses évidences ; c’est assurer la réussite de tous ; c’est aussi rendre l’école plus efficace et la mettre à l’heure de son siècle… »
Extrait du rapport n° 2013-041 mai 2013
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1909 – 2014 : Journées de retrait de l’école, livres condamnés, refus de la loi commune …
A un siècle d’intervalle, au-delà de la surprise que cela peut provoquer, la similarité de ces conduites interroge…
Après les divers mouvements sociétaux que nous venons de connaître, une telle hostilité à l’égard d’une école qui s’attache à porter les valeurs des Droits de l’Homme ne peut qu’inquiéter …
Quelle société cette nouvelle fédération de parents d’élèves entend-elle promouvoir ?
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* Il y a un siècle, ils auraient été : la société d’Education, l’Action Populaire de Reims, l’Association Catholique de la Jeunesse Française, les secrétariats sociaux, la Ligue Patriotique des Françaises...
**aujourd’hui, il semblerait que ce soient davantage des mères qui s’activent.