Préparatifs ... Je vous l’avais dit : il a encore grandi notre arbre !
Propos introductif du président de l’A.L. Concarneau :
"Ce samedi 10 décembre, nous célébrons l’anniversaire de la loi de 1905, dite loi de Séparation des églises et de l’Etat. L’idée a été lancée par Annie et Joël, deux membres de notre groupe Laïcité Aujourd’hui.
Célébrer : à ne pas confondre avec commémorer.
En effet, même s’il nous arrive de regarder dans le rétroviseur – un retour à l’histoire est parfois nécessaire - , C’est essentiellement vers l’avenir que nous sommes tendus. Aucune nostalgie donc … c’est demain qui nous intéresse, et nous continuons de penser que la laïcité reste le meilleur support pour notre « vivre ensemble ». Il y a 6 ans, c’était Bernard Berest qui nous exposait combien elle reste "une valeur universelle pour le 21 ème siècle."
La parole est donnée à l’un des membres du groupe de travail Laïcité Aujourd’hui :
Nous sommes réunis autour de cet arbre pour célébrer la Laïcité et le 106ème anniversaire de la loi de Séparation des églises et de l’état. Ce jour du 9 décembre 1905 le mérite car les moments où les citoyens acquièrent des libertés et des droits nouveaux sont rares. Nous savons tous par expérience qu’il est plus facile de serrer une vis que de la desserrer. Et c’est la même chose en politique .
Avant cette petite cérémonie nous avons assisté à la conférence de Ahmed Djebbar qui nous a captivé par ses connaissances historiques, ses références religieuses, et son approche sociologique de la relation entre les musulmans et la République. Mais sa remarque concernant la méconnaissance de la laïcité par beaucoup de nos concitoyens m’impose d’y revenir. Et donc, comme Pierre Bleuzen m’en a chargé, vous n’échapperez pas à la petite piqure de rappel.
L’article premier de la Constitution est ainsi rédigé : « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale ». Remarquez avec moi que la République est d’abord laïque avant d’être démocratique c’est à dire que la souveraineté du Peuple s’exerce dans l’espace de la Laïcité.
La laïcité se définit par trois principes : la liberté de conscience, l’égalité de droits de toutes les convictions spirituelles et l’orientation universelle de la puissance publique.
La liberté de conscience est le droit pour chacun de choisir les valeurs, les idées qui gouverneront sa vie. C’est donc la liberté d’avoir sa propre religion, de n’en avoir aucune, de pouvoir en changer. La laïcité c’est aussi l’égalité entre tous, les croyants, les agnostiques, les athées. Enfin la défense de l’intérêt général engage l’État à s’opposer à la captation de la chose publique par des intérêts idéologiques ou économiques particuliers.
Que nous a montré l’actualité récente ?
Là où une majorité porte au parlement les plus radicaux de ses religieux pour y faire sa loi, où est le respect de la liberté de conscience ?
Là où le gouvernement décide que 30 églises seront dorénavant reconnues sur 300 groupes religieux auparavant, où est l’égalité ? Là où le gouvernement d’un pays ruiné prête serment devant les prêtres d’une église richissime qui ne paye pas l’impôt, où est l’intérêt général ?
Ne nous étonnons pas, voilà comment s’exerce la démocratie sans laïcité !
J’ai entendu un ancien premier ministre dire : « je suis laïque ». Il faisait bien sûr référence à son activité publique. Être laïque, est-ce être antireligieux ? Non, par respect de la liberté de conscience. Est-ce être athée ? Non, être laïque ne concerne que sa vie publique et pas ses propres choix spirituels. Est-ce être tolérant ? Non, il faut considérer les autres comme des égaux sans distinction tandis que celui qui est toléré n’est pas à égalité avec celui qui tolère, un jour beaucoup, un jour moins. Est-ce être neutre ? Non, car il faut toujours s’opposer aux intérêts particuliers pour défendre l’intérêt général.
Sans éducation des citoyens que vaut la démocratie ? Peut-être sommes nous déjà en train d’essayer l’ignorance !
On peut classer dans cette catégorie, le comportement d’un maire qui organise une cérémonie multiconfessionnelle à la place d’une cérémonie laïque, ou l’attitude d’un autre qui prend fait et cause publiquement dans le conflit qui oppose le curé à son évêque.
D’une toute autre gravité est la décision d’un maire de livrer clé en main, imam compris, un lieu de culte et se retrouve avec une révolte des fidèles sur les bras, lesquels lui reprochent fort justement de se mêler de leurs affaires. Où est la Laïcité ?
Nous assistons à des manifestations toujours plus nombreuses d’intransigeance tantôt culturelle, tantôt vestimentaire ou alimentaire, où ce qui est du ressort de la vie privée envahit l’espace public. Tout récemment, un groupe représentant quelques religions n’a pas hésité à revendiquer une présence reconnue dans l’espace public, en argumentant comme si ils détenaient le monopole de la spiritualité. Pas étonnant qu’on manifeste devant les théâtres, qu’on brule un journal ! A quand le tour des poètes ? La République laïque ne distingue pas le temporel et le spirituel mais la vie privée et la vie publique.
Le citoyen devrait pourtant pouvoir compter sur la puissance publique, mais il assiste à une dérive venue du plus haut niveau de l’état.
Le ministre de l’intérieur institue dans chaque préfecture, une conférence sur « la liberté religieuse » ce qui est extraordinaire pour un état qui ne reconnaît aucun culte, pendant que le ministre des affaires étrangères choisit des théologiens connus pour leurs positions rétrogrades comme experts en technologies nouvelles et en éthique auprès de la Commission européenne. Nous sommes sur la voie du progrès à rebours, les femmes en particulier.
Pendant ce temps, pour tenir les quartiers populaires les plus turbulents, le gouvernement laisse faire des groupes qui répandent une idéologie religieuse extrémiste. Et la politique économique dont la doctrine néo‑libérale ne cache pas que son principal moteur est la cupidité, limite toujours plus les moyens de former les futurs citoyens par l’éducation.
Ceci nous éloigne non seulement de la République laïque mais aussi des objectifs de la République sociale qui ont en commun de se préoccuper de ce qui est juste, et contribue à déstabiliser la société.
Nous appelons donc de nos vœux un retour aux valeurs de la République : liberté, égalité, fraternité, que nous déclinons avec la Laïcité en : liberté de conscience, égalité des options spirituelles et défense de l’intérêt général.
La parole est ensuite donnée à la Ligue des Droits de l’Homme, section Françoise Bosser.
Les élèves de l’école du Centre Ville disent le poème d’Aragon : La rose et le réséda. Ils ont contribué à la décoration de l’arbre en confectionnant des roses et des résédas que nous avons suspendus.
Une élue d’opposition, puis monsieur le Maire nous donnent lecture du discours qu’ils ont préparé pour cette occasion.
Un pot de l’amitié bien sympathique clôt la cérémonie, une "première officielle" dans la ville de Concarneau où une bonne cinquantaine de personnes étaient présentes.
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Les textes suspendus
"La laïcité n’est pas une opinion : c’est la liberté d’en avoir une."
La loi de 1905 est plus révolutionnaire que ses auteurs s’en étaient douté : elle met fin à des millénaires de croyances obligatoires qui contraignaient, et le cas échéant sanctionnaient, les incroyants ou les adeptes des religions non admises par l’État. André Damien
« La Laïcité doit se comprendre comme l’édification d’un monde commun aux hommes sur la base de leur égalité et de leur liberté de conscience, assurée par la mise à distance de tous les groupes de pression. C’est pourquoi l’affirmation de la Laïcité ne se construit pas contre le seul cléricalisme religieux, mais aussi contre toute captation ou mise en cause de la chose publique par des intérêts idéologiques ou économiques particuliers. Elle ne se réduit donc pas à une neutralité d’accueil. » H. Pena Ruiz
" La laïcité n’est pas une option spirituelle parmi d’autres, elle est ce qui rend possible leur coexistence, car ce qui est commun en droit à tous les hommes doit avoir le pas sur ce qui les sépare en fait. " Régis Debray
"Finalement, la laïcité semble être la condition absolue de l’absolue liberté d’être soi-même. Par là, elle est la condition nécessaire de la démocratie. Et, de façon un peu surprenante pour certains, elle semble aussi être la condition de l’acte de foi responsable qui est au cœur de l’engagement religieux". C.e.d.e.c.
« Il ne suffit pas qu’un peuple inscrive la liberté dans sa constitution pour être réellement un peuple libre. Encore faut-il qu’il soit un peuple éclairé, car un peuple ignorant, même avec une constitution libre, est toujours dans la servitude ». Montesquieu
« Il faut choisir : se reposer ou rester libres ». Thucydide
"Un peuple ignorant s’abandonne sans discernement à la parole des charlatans et au pouvoir des tyrans" CONDORCET
" La laïcité est le droit et le devoir de parler haut et ferme au nom de la Raison " F. Buisson
"Être laïque, ce n’est point vouloir violenter, ce n’est point vouloir mépriser les consciences détenues dans les vieilles chaînes des croyances, c’est refuser aux religions qui passent le droit de gouverner l’humanité qui dure. Être laïque, ce n’est point consentir la soumission de la raison à un dogme immuable, ni l’abdication de l’esprit humain devant l’incompréhensible : c’est ne prendre son parti d’aucune ignorance ni d’aucune misère, c’est livrer bataille au nom de la justice." Ernest Lavisse (historien - 1842-1922)
« Nous ne sommes pas les ennemis de la religion. Nous sommes au contraire, les serviteurs de la liberté de conscience, respectueux de toutes les opinions religieuses et philosophiques ». L. Gambetta