La jeunesse française, l’école et la République

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Pour la réunion du 17 janvier 2024, par MPB

La jeunesse française, l’école et la République, est un ouvrage publié aux éditions de l’Observatoire en août 2022.

Son auteur est IANNIS RODER.

J’ai retenu cet ouvrage parce que les analyses de son auteur s’appuient directement sur son vécu ; Iannis Roder est professeur agrégé d’histoire dans un collège situé en R.E.P., et ce, depuis plus de vingt ans.

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Iannis RODER est un homme engagé ... Ainsi, il dirige l’Observatoire de l’éducation de la Fondation Jean Jaurès ; il est également responsable de formations au mémorial de la Shoah ; de plus, il est membre du Conseil des Sages de la laïcité.

JPEG Dans cet ouvrage, Roder tente d’alerter tous les citoyens sur les adaptations à fournir pour refonder l’institution scolaire, et par-là même refonder le pacte républicain. Pour lui, cela va de pair.

D’emblée, il rappelle que le niveau des élèves baisse en France (PISA ?), mais pas pour tout le monde ! Selon lui, l’origine sociale des élèves l’ explique ; car l’Education nationale organise le recrutement dans ses établissements scolaires à partir d’un découpage géographique … (carte scolaire) ; ce qui génère une ghettoïsation, dit-il … encore aggravée par le phénomène « d’évitement scolaire » (1 ) (les familles aisées comme à Paris, ou à Marseille, contournent ce découpage …). Ceci amène Roder à parler de ghettos de riches ; de ghettos de pauvres… parce que la mixité culturelle à l’école n’existe plus.

Des initiatives ont pourtant vu le jour. A Toulouse, par exemple, en 2017, la préfecture de Haute-Garonne a fermé deux collèges du quartier du Mirail et les élèves de ces quartiers populaires ont été conduits par des bus dans des collèges de « centre-ville ». Autrement dit, un secteur « multi-collège » est créé : seule la tranche d’âge est prise en compte pour les inscriptions, si bien que des élèves issus de milieux familiaux différents se retrouvent ensemble en classe. Ce fut un pari audacieux mais, quatre ans plus tard, il a fait mentir les sceptiques. Les sujets de préoccupations des uns et des autres se côtoient, et s’affrontent : il est parfois inconcevable à certains que l’on puisse plaisanter sur la religion ou la croyance.

L’ère numérique aggrave encore la situation, car le temps d’exposition aux réseaux sociaux et aux écrans dépasse largement les « trente minutes » souhaitables, selon Bruno Pattino, docteur es internet du monde médiatique, ce qui présenterait un danger pour la « santé mentale » des élèves. Ainsi, ces derniers ont beaucoup de mal à rester concentrés sur un travail et décrochent ; (Roder fait référence à l’ouvrage de Bruno Patino intitulé : La civilisation du poisson rouge. Petit traité sur le marché de l’attention.) ! De fait, l’enfant devient un zappeur permanent dont la croyance l’emporte sur la vérité.
A signaler qu’aux Etats-Unis, notamment dans la Silicon Valley (où sont les GAFAM), naissent des établissements « techfree ». Les appareils technologiques y sont bannis... comme je l’évoquais lors d’une précédente réunion.

Autre élément important : en France, le « stock de mots » dont disposent les élèves nuit à la compréhension des cours. Ainsi, Boris Cyrulnik, neuropsychiatre, affirme que ce stock de mots est de seulement 200 pour un enfant de trois ans qui a vécu dans un milieu insécurisé, alors qu’il est de 1000 mots pour un autre enfant …
Des questions complexes comme les Valeurs de la République et la Laïcité sont d’autant plus difficiles à appréhender.

Le manque de culture historique nuit également à la compréhension. Un exemple : Les élèves connaissent-ils la Shoah ? (21 % des 18-24 ans n’en ont jamais entendu parler…). Roder s’interroge : Est-ce que l’école offre le temps nécessaire pour décortiquer ces sujets ?

Or, il faut faire penser nos élèves, quelle que soit la discipline, en développant la maîtrise des mots employés, et en incluant l’éducation à l’image.

Dès les années 2000 (en Seine Saint Denis, en tout cas), un autre élément inquiétant apparaît dans les classes : Roder évoque déjà une haine antisémite véhiculée par l’islamisme, qui perturbe les cours, mais n’est « entendue », ni par les responsables d’établissements, ni par les politiques ; même si des référents laïcité ont été créés dans chaque rectorat, en 2015, après Charlie Hebdo, par la ministre Najat Vallaud-Belkacem.

Aujourd’hui, comment faire reculer ces contestations d’enseignement ?

Certes, des formations sont proposées au plan national … Un plan, que Roder juge d’ailleurs ambitieux, a été initié par J.M. Blanquer.
Des équipes intitulées : « Valeurs de la République » ont été mises en place dans chaque académie. Ce plan, sur quatre ans, était prévu pour former les enseignants aux valeurs de la République et au principe de laïcité dans leur établissement. D’autre part, des diplômes universitaires sur la laïcité sont créés.

Roder rappelle que pour un quart des personnes de moins de 35 ans, les notions de république et de démocratie ne sont même pas maîtrisées ! Quel sens a alors la démocratie représentative ? Ne se trouve-t-elle pas mise en question ? Par contre, ces jeunes semblent être demandeurs de démocratie directe. En fait, ils refusent la délégation des pouvoirs … Est-ce possible en démocratie ?

Roder note également des points inquiétants :
- en particulier, l’attrait pour un pouvoir fort, il y a attirance pour la force et l’autorité ; un personnage comme Hitler est admiré.
- il note aussi la défiance envers le personnel politique
- et le désintérêt de la chose publique.
Ainsi, dit-il, 41 % des 18-24 ans n’ont pas voté à la dernière élection présidentielle …
Certes, l’adhésion à la manifestation de rue progresse, mais c’est au détriment du vote et de l’élection !
Selon lui, la socialisation familiale et son niveau culturel semblent déterminants dans ces attitudes ; cela est également perceptible lors des échanges en classe.

Comment alors faire naître l’indépendance de la morale et de la science à l’égard des religions révélées ? (C’étaient déjà des idées évoquées par Jules Ferry au 19ème siècle).

Dans son ouvrage, Roder relate une expérience menée dans une de ses classes en 2021 : il a lu un sondage IFOP à ses élèves, sondage qui montre que 51 % des Français disent ne plus croire en Dieu. Il leur a demandé s’ils pensaient que leur classe était représentative de ce que pensent et croient les Français. Les commentaires des adolescents ont fusé : « Mais tout le monde croit » ou encore « c’est pas possible ! »… « Mais monsieur, c’est les Français, ça. Eux, ils croient pas, mais nous oui »….
En effet, « une partie de la population, croissante, s’éloigne du religieux, quand l’autre au contraire, réactive ses appartenances », notamment dans les quartiers périphériques des grandes métropoles, où vit une population majoritairement musulmane … Entre un tiers et la moitié des français musulmans se déclarent pratiquants ; ce qui est nettement supérieur, en proportion, aux français catholiques.

Roder note également que presque tous les lycéens de seconde qui ont des parents musulmans utilisent la dimension religieuse pour se définir. Seuls 3% des lycéens de seconde ne le font pas. (étude de O. Galland et A. Muxel)

Pour 32 % de ces jeunes lycéens musulmans, il n’y a qu’une seule vraie religion : l’islam ; leur religion détient la vérité absolue, non seulement en matière de religion, mais aussi dans le domaine du monde séculier.
… ainsi, pour expliquer la création du monde, ils choisissent la religion contre la science…

Ils critiquent aussi certains enseignements ; d’où les difficultés de certains professeurs, quand il y a contradiction entre leur discours et les croyances de ces jeunes… Car, le discours enseignant et le savoir scientifique sont remis en cause.
D’autre part, Roder remarque que ces jeunes français musulmans sont moins ouverts à une société culturellement libérale ; ainsi, la question de l’homosexualité n’est ni acceptée, ni comprise.

A la suite de l’assassinat du professeur Samuel Paty (en octobre 2020), une élève lui dira. Oh ! « Monsieur, j’ai eu peur que ce soit vous » !
Cependant, 793 faits sont remontés au ministère un mois plus tard. (il s’agissait d’atteintes à la laïcité, de contestations d’enseignements, de tenues religieuses…).
C’est en éducation physique et en sciences que les incidents sont les plus importants… (il y a le corps à cacher, la notion de darwinisme est contestée, la création du monde également).

« Il y a cent quarante ans, quand l’école devenait laïque, la République avait une ambition : soustraire les consciences des enfants de France à la mainmise qu’exerçait alors sur elles l’Église catholique. Et elle y est parvenue pendant des décennies... » Mais tout semble à refaire !

A cette époque, « Les Républicains étaient animés par l’idée de la pérennité de la République. » Ainsi, les lois Ferry de 1882 ont instauré l’éducation religieuse en dehors des établissements scolaires, et l’enseignement, à l’école, est confié à un personnel laïque.
« Dans les années 1980, la question religieuse s’invite à nouveau à l’école… (C’est l’affaire du foulard islamique à Creil en 1989).
A noter que ce sont des croyantes et des croyants qui se dressent contre la République, et non une institution … Croire et obéir, telle est la devise de ces croyants.…

Pourtant déjà, en janvier 1910, J. Jaurès affirmait : « Ne pas être soumis à un dogme pour se déterminer, voilà la vraie liberté ! »….
Et, bien avant, dans les années 1870, Ferdinand Buisson précisait : « Croire, c’est ce qu’il y a de plus facile, et penser, ce qu’il y a de plus difficile au monde ».

Dès 1936-37, le ministre Jean Zay avait d’ailleurs interdit la construction de chapelles dans tout nouveau collège ou lycée. Car à l’école, il s’agit de former des esprits libres. L’école doit faire appel à la raison ! Catherine Kintzler ne dit pas autre chose de nos jours.
Or, aujourd’hui, ce qui définit les jeunes français, c’est l’appartenance au groupe, avec ses coutumes et ses religions… Ils sont souvent incapables de se définir comme individus autonomes ! Dès lors, se définir comme citoyen les dépasse. N’oublions pas que « C’est après un cours qui prenait en exemple la critique des religions pour parler de liberté d’expression que Samuel Paty a été assassiné ... ». Certains élèves ne peuvent entendre un discours autre que celui auquel ils croient ! Et, « Pour une partie de ces jeunes, la loi de Dieu passe avant celle de la République… ». « Il n’est d’ailleurs pas rare que des élèves s’étonnent que la loi ne reconnaisse pas le mariage religieux » (qui souvent dans leur communauté a lieu avant le mariage civil...)

« A partir du moment où la vision religieuse l’emporte sur la vision sécularisée, et que les règles religieuses ne sauraient être contrariées par les règles communes, cela commence à poser problème... », souligne I. Roder. Or rappelle-t-il, la France est une nation constituée de citoyens libres et égaux en droit et non pas constituée de communautés religieuses. La loi des hommes doit être au-dessus de la loi de Dieu !
Il rappelle que lors des Présidentielles de 2022, certains votes ont pu reposer sur des considérations religieuses. Roder cite un vote obtenu sur les critères suivants : « il défend les musulmans … il défend le voile à l’école… » . Or la république ne fonctionne pas sur des bases communautaires ; penser l’intérêt général, c’est faire en sorte que chaque citoyen revendique pour les autres les mêmes droits que pour lui … autrement dit, c’est penser en tant que citoyen ! Et le rôle essentiel de l’école est justement de former des citoyens libres, libres et attachés à la République et à son fonctionnement démocratique. Le vote communautaire semble devenu un vote de protection...

Dans un autre un cours, Roder demanda à ses élèves si un professeur pouvait enseigner que Dieu avait créé le monde et les espèces vivantes ; ceux-ci répondirent qu’ils savaient que le professeur de sciences était tenu de leur enseigner le discours de la science, mais eux n’y croient pas, car ils savent que c’est Dieu qui a créé les espèces, cependant ils ne disent rien … D’autres affirment préférer avoir un zéro lors d’une évaluation sur la théorie de l’évolution, plutôt que d’écrire ce qu’ils rejettent, l’islam étant la vraie parole pour eux….

Cela interroge sur leur rapport à l’école ; pour certains d’entre eux, c’est finalement croyances contre croyances. Et tous les espaces scolaires sont impactés : qu’il s’agisse des cantines, de l’E.P.S., de la natation, des sorties scolaires, des cours de sciences…

Comment l’école peut-elle alors parvenir à aider ces élèves à se construire une pensée autonome ?

Ainsi, pour beaucoup d’entre eux, la laïcité se résume à des entraves à la liberté : ils assimilent souvent à du racisme l’interdiction des signes religieux ostentatoires de la loi de 2004 ! ...
Un sondage de la L.I.C.R.A. (Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme) réalisé en mars 2021, nous apprend que 40 % des lycéens sans religion sont favorables au port de signes religieux dans les établissements scolaires (LICRA/Le droit de vivre). Un autre sondage montre que plus de la moitié des lycéens et collégiens sont pour le port de signes religieux à l’école, donc hostiles à la loi du 15 mars 2004 !

D’autre part, ces jeunes ne font guère de différences entre les différents espaces… qu’ils soient privés ou publics. Ainsi, une de leurs références est qu’au Royaume-Uni, les policières portent le voile ! Aux États-Unis, la liberté religieuse est considérée comme un droit naturel et protégée par l’intervention de l’État … Tandis qu’en France, l’État, par sa neutralité, protège la liberté de conscience des citoyens !

La déclaration des droits de l’homme et du citoyen en date du 26 août 1789 le précise : « Nul ne peut être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la loi. » … La liberté de croire, de ne pas croire, de changer de religion est inclue dans ce texte !!!
Pourtant 52 % des lycéens ne sont pas favorables au droit de critiquer une croyance ; ils sont même 78 % chez les musulmans ! Ils pensent qu’il faut limiter la liberté d’expression. (Est-ce une allusion à l’assassinat de Samuel Paty ?)

Le sociologue Olivier Galland affirme que l’école renforcerait le clivage culturel initial plutôt qu’elle ne le réduirait. (Olivier Galland : Sociologie de la jeunesse ; 2011)

La défiance vis-à-vis de la démocratie, le discours religieux de certains élèves au sein de l’école a finalement surpris une institution qui, semble-t-il, n’était, pas prête à y répondre !

Roder aborde ensuite une autre thématique et son dernier chapitre s’intitule :
Le corps enseignant est-il encore républicain ?

Force est de constater que l’école a souvent du mal à enseigner dans la sérénité, dit-il ! Des professeurs (plus d’un quart d’entre eux, semble-t-il) reconnaissent s’autocensurer et ne pas aborder certains sujets qu’ils jugent sensibles (comme des sujets provoquant discussions, contestations ...).
Or l’école n’est-elle pas le pilier de la pérennité de la République ! Si ses valeurs, ses principes ne sont pas abordés à l’école, comment se construira notre pacte social ? Comment le principe de laïcité sera-t-il compris ?

L’autorité pédagogique de Samuel Paty avait été remise en cause par une élève, d’ailleurs absente lors du cours en question. Et, cette contestation fut relayée sur les réseaux sociaux par le père de l’adolescente.

Au total, 50 % des enseignants disent avoir été victimes d’agressions, physique ou verbale, au cours de leur carrière ; 30 % des enseignants de moins de 30 ans disent avoir subi une agression (cela va des insultes, des propos calomnieux sur Internet, ou en relation de face-à-face !) ; 7 % d’entre eux ont déjà été victimes d’agressions physiques (avec I.T.T.). Les violences peuvent d’ailleurs être exercées par des parents d’élèves !
Toutefois, 82 % des professeurs avouent exercer leur métier avec plaisir. Même si 22 % d’entre eux disent avoir du mal à maintenir la discipline dans leur classe, (notamment en lycée). Or, comment transmettre des savoirs, sans discipline, sans climat apaisé ?

Développer la capacité d’attention des élèves semble donc essentiel ! Car s’il n’y a pas acquisition de connaissances, seul reste ce que l’on croit !!!

Les conditions de travail des enseignants sont souvent évoquées. Le manque de soutien de l’institution est notamment mis en avant, en cas de problèmes avec les élèves ou les parents d’élèves… Ainsi, les mises en doute qui ont accompagné Samuel Paty témoignent « du manque d’unité de l’institution derrière son professeur ».

D’autre part, il semblerait que le principe de laïcité ne soit plus transmis, enseigné, alors qu’il allait de soi dans les générations précédentes ! En conséquence, est- ce que le principe de laïcité dans le cadre scolaire, est encore compris ? Selon Roder, les jeunes enseignants semblent aussi gagnés par la vision anglo-saxonne privilégiant la liberté individuelle.
56 % d’entre eux soutiennent même la possibilité d’accompagner une sortie scolaire en affichant son appartenance et sa pratique religieuses par le port du voile, contre un tiers de ceux de plus de trente ans. Quatre jeunes enseignants sur dix se disent favorables au port des signes religieux par les agents de l’état (qu’ils soient policiers ou enseignants…), ils sont donc en complète contradiction avec le principe de laïcité ! Alors que, paradoxalement, 96 % d’entre eux se disent favorables à la loi de 1905 !

94 % des professeurs de l’enseignement public approuvent la loi de mars 2004, même si actuellement, certains d’entre eux semblent défendre le port de ces tenues religieuses … et ne font même pas ôter le voile à ces jeunes filles en classe.
Les jeunes filles en question parlent de liberté de s’habiller selon son choix, de traditions …
Pourtant, depuis cette loi, des jeunes filles d’origine ou de culture musulmane ont profité de ces décisions, que Roder appelle émancipatrices car elles leur ont permis d’élever leur niveau d’études. "Cette loi n’est donc pas raciste", précise-t-il !
A signaler que les équipes de formateurs : « Valeurs de la République », parfois sollicitées par les chefs d’établissement, sont souvent mal accueillies par les enseignants !

On peut se demander si certains fonctionnaires ne confondent pas leurs engagements personnels et leur vie professionnelle. La formation des enseignants sur la notion de fonctionnaire, sur le principe de laïcité apparaît nécessaire ! Car, « Lorsqu’on devient professeur, on devient fonctionnaire, » on doit donc connaître les valeurs de la République, et les transmettre. C’est un devoir, affirme Roder.

Les jeunes enseignants devraient donc maîtriser l’histoire de la laïcité, savoir qu’elle renvoie la croyance dans la sphère privée, pour ne s’appuyer que sur ce qui est scientifiquement démontrable et ne pas oublier que la science permet le doute alors que la foi ne l’admet pas ! A noter que grâce à la loi de 1905, chacun peut croire et pratiquer sa religion, s’il le désire, mais hors de la sphère scolaire, ce que n’admettent pas 80% des élèves de R.E.P.
Il est vrai que cette mission confiée aux enseignants est difficile dans un contexte de retour du religieux, dans les débats publics comme dans les pratiques. Ainsi, dans l’échange pédagogique, l’enseignant est astreint à la neutralité alors que les élèves ont le droit d’exprimer librement ce qu’ils pensent … Mais tous les propos ne se valent pas… et le professeur doit être capable de faire entendre la dimension libératrice de la laïcité ! Mais, travailler à la déconstruction des préjugés demande de la retenue, de la patience, de la compréhension.

Roder s’interroge sur la nature et le contenu de la formation initiale des enseignants, alors que cette formation est essentielle. Pour rappel, les étudiants, dans le cadre des INSPE à l’université, - Instituts nationaux supérieurs du professorat et de l’éducation - (anciennes IUFM) préparent un master MEEF : métiers de l’enseignement, de l’éducation et de la formation. Les lauréats intègrent un établissement scolaire pour quelques heures hebdomadaires, mais demeurent étudiants à l’INSPE à mi-temps, donc à l’université. Comme JP Obin, Roder interroge : Pourquoi l’Education nationale ne forme-t-elle pas directement ses enseignants ? A quel moment sont-ils initiés aux valeurs de la république ? À la laïcité ?
Il ajoute également qu’il n’y a « d’école efficace et performante qu’avec des professeurs considérés et motivés. »

De plus, certains territoires ont besoin plus que d’autres de personnes expérimentées dans les établissements scolaires ; mais les procédés de nomination font que c’est là qu’arrivent bien souvent les enseignants les plus jeunes ! Autre interrogation de Roder : " Les niveaux de rémunération ne seraient-ils pas à revoir en lien avec la diversité des territoires et le coût de la vie ?"

En conclusion !
J’ai retenu une phrase formulée par Roder… :
soit :
« L’école peut et doit s’améliorer pour faire en sorte que la République, parce qu’elle fait le pari de la liberté et de l’intelligence, apparaisse comme le meilleur des modèles et la démocratie représentative comme un socle indépassable. »

soit :
En première ligne du combat émancipateur de la République, les enseignants, « conscients de la centralité de leurs missions, doivent à nouveau se sentir considérés, car sans ses professeurs, l’école ne peut fonctionner et c’est notre système politique qui risque de se retrouver en grand danger. »

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Remise du prix Jean ZAY à Iannis RODER en 2023, avec ce commentaire :

« Parce que nous savons que la République et la démocratie sont mortelles et qu’elles ne doivent leur existence qu’à l’attachement des Français, ce détachement d’une partie de la jeunesse de notre socle commun doit collectivement nous questionner. »


Les débats ont débuté par la situation des R.E.P.

RE.P. : établissements en fonction d’un "indice social" en référence au
• taux de catégories socio-professionnelles défavorisées
• taux d’élèves boursiers
• taux d’élèves résidant dans un QPV (quartiers prioritaires de la politique de la ville)
• taux d’élèves ayant redoublé avant la sixième

Rarement les enseignants sont formés au travail qui les attend dans ces zones.

JP. Obin, ainsi que plusieurs journalistes, ont signalé la situation depuis des années ; mais si le constat a été fait, rares sont les politiques qui se sont saisis du problème.

S’agissant de laïcité, et concernant Concarneau et ses alentours, qu’avons-nous fait ? Des soirées citoyennes dans la plupart des communes alentour (jusqu’à Brest et ses environs), des interventions aux congrès DDEN, FCPE, en collèges et lycées ; il reste que pour les établissements scolaires du second degré, les priorités sont ailleurs … La création du site afin de mettre nos travaux à disposition (nous approchons le million de visites). Les diverses expositions. Le rendez-vous annuel avec les politiques du secteur autour de l’arbre de la laïcité. Nous regrettons l’absence d’association similaire à Laïcité Aujourd’hui, pour échanger, enrichir notre réflexion … marcher ensemble. Les valeurs partagées en 1905 sont-elles encore présentes ? Les libertés individuelles de type anglo-saxonnes prévalent … et la laïcité ne réapparaît que lors d’événements graves.
Quid du monde politique aujourd’hui ? Son expression ressort souvent du monologue ; exit le vrai débat, l’échange argumenté …

Les outils de l’école : professeur, est-ce encore considéré comme un métier ? Comment parvenir à renverser la vapeur, à transmettre une perspective autre que le consumérisme, à cultiver l’esprit critique … ?
Quel rôle doivent jouer les parents ? Quel est l’impact des réseaux sociaux (un travail est engagé sur ce sujet précis)

La laïcité est passée au second plan : l’économique, voire « la loi de la jungle », ont pris le pas : s’enrichir, en quête de pouvoir, pour ne pas se faire « manger ». Toute la classe politique semble sur cette dynamique.

Recruter et former des enseignants se feraient-ils au détriment de l’économie ?

La laïcité apparaît rarement dans le discours des politiques. L’économie a-t-elle besoin d’une société apaisée ? Ne vit-elle pas mieux en temps de guerre ? cf. débat Mélenchon – Attali

C.F : ne soyons pas pessimistes : autour de cette table, il n’y a que des gens motivés. La laïcité a semblé longtemps acquise (rôle de l’école, du collège, de la FCPE …). Aujourd’hui, elle n’est pas seulement absente des quartiers difficiles ; le monde extérieur est entré dans l’école, nourri par les réseaux sociaux, et se crée un « séparatisme » énorme : ghettos de riches, ghettos religieux, ghettos de quartiers …

Allusion est faite à l’énorme « bêtise » de la nouvelle ministre de l’E.N. » ! Stanislas est très éloigné de la laïcité.

Racisme, antisémitisme, anti-islamisme… Même si la loi l’autorise, que signifient exactement le port de signes religieux dans la rue ? La loi l’autorise et les médias ne parlent que d’eux. Où se situe la discrétion du croyant, celle que nous connaissions il y a une ou deux décennies ?

Où va mener le communautarisme ? A une différence des droits ?

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